Aujourd’hui fut une journée très productive. L’équipe a fonctionné à grand régime. Nous avons enregistré les voix de cinq lecteurs/lectrices.

  • Justin Comeau (derrière la poissonnerie de Saulnierville, la caméra tournée vers la bâtisse, Justin faisant face à la mer).
  • Serge Landry (à Comeauville, rue du Quai, en fond de scène des casiers à homards).
  • Richard Landry, père de Serge (même lieu, même décor, tout de suite après l’enregistrement de son fils).
  • Natalie Robichaud (à côté de la maison aux roses grimpantes, les pieds dans les orties, svelte, le regard clair).
  • Georgette LeBlanc (près d’une yourte, dernière l’université, non loin de la mer, après sa réunion de comité, à la nuit tombée).

Le matériel sonore et visuel s’accumule, ce qui augure bien pour le spectacle de lundi prochain. Simon et David auront de bons échantillons, ce qui devrait inspirer la musique d’Érick. Quant à moi, ce sera un des temps forts de la tournée : j’ai animé un atelier de twittérature en après-midi.

L’atelier de twittérature

La galerie du Trécarré accueille l’atelier. Transport de tables. Vérification des branchements pour le projecteur. Déplacement des chaises. Mot de bienvenue de l’animateur. Présentations, Poignée de main du formateur aux participantes. Sept femmes sont présentes avec l’outil prisé des twittérateurs mobiles : le téléphone intelligent.

3-2-1, allez ! ça démarre.

Au programme : 6 exercices, 6 thèmes, 6 contraintes. Nous avancerons tranquillement pendant deux heures en peaufinant nos formes et nos formules. Je dis « nous » car je veux bien jouer au texte bref avec les participantes, question d’éprouver moi aussi le frisson du bref. Et puis, tout ceci permet le commentaire interactif si riche en découvertes de tournures adaptées au tweet littéraire.

D’entrée de jeu, « qu’est-ce que la twittérature ? » demande une dame. Mais c’est tout simple : c’est de la littérature qui se fait dans Twitter. La twittérature utilise Twitter comme lieu de production et de diffusion instantanée de textes brefs. Le twittexte, le gazouillis littéraire si on veut, s’inscrit toujours sur l’écritoire mobile de nos téléphones ou de nos tablettes. Il est léger, minuscule, il tient dans le creux d’une main. Il transporte avec lui le poids du virtuel. Tous les écrivains qui participent au mouvement s’inscrivent d’emblée dans une recherche de correspondances entre les mots, mais aussi entre les phonèmes, les images et les sons. Ils exploitent la métaphore et l’allitération. Ils jouent du coude dans l’antithèse et l’oxymoron. Ils voyagent parfois parmi les étages des niveaux de langue. Ils sont polis ou vulgaires. Mais ils sont souvent sublimes. Les figures de rhétorique alimentent leur arsenal. Ils ont une haute exigence de la forme et du dire. Ils se savent héritiers des formes brèves. Ils côtoient la maxime, la devise, l’aphorisme, l’apophtegme, le proverbe. l’adage, l’historiette et le haïku. Et, d’une façon plus prosaïque, ils pourraient également dire qu’ils sont servis par la citation, le fragment, la note, le condensé, le résumé, la vignette ou le sous-titre.

Ces rapprochements suffisent pour ostraciser tous les ploucs qui s’y épivarderaint en insanités, mensonges, outrages et autres fake news. La seule charge possible en twittérature est l’assaut des mots. Ceci étant dit, l’atelier peut tranquillement se déployer pendant deux heures en suggérant que la twittérature est un acte de haute fidélité à la beauté du dire. On pourrait presque dire que le twittérateur passe une sorte de contrat d’authenticité avec un réseau d’abonnés qui attendent au bout du fil, à coup de 140 caractères m a t h é m a t i q u e m e n t  comptés, que la métaphore et l’émotion leur révèlent son univers et ses enchantements.

En cours d’atelier, des mots acadiens se sont mêlés à nos propres mots. Des surprises sont apparues sur les écrans, des beautés ont ruisselé sur le fil. Nous les avons commentées au fur et à mesure en poursuivant notre recherche du tweet parfait.

La twittérature, vraiment ! Ce mini genre issu du virtuel qui se dissémine en réseau en s’éclatant sous nos yeux, arrimé aux traditions du texte bref.

JYF, le 9 août 2017