LE VIVANT
adaptation de Jonathan Roy
Nouveau-Brunswick

Ça fait déjà corps, le mal. Ça fait déjà place, au lieu. Ça se fait dans l’espèce, dans la race. Pis toute recommence par la corruption du milieu, par la gelée, par la saumure pis par le ring du serpent. Ça s’énerve. Ça se splitte. Ça s’épare. C’est la moitié du ciel garrochée dans l’usure de l’arbre; petit boutte rescapé de l’espèce ou une baie dans une baie qui s’avale sans se répéter. Homme-fougère, homme-poisson. C’est plein de craques pis de cliffs, le vivant. Ça espère pour un corps, pour des corps, pis l’énervement de l’événement.

Par la gelée pis la saumure, la fougère est là dans sa géométrie obscure, racines plantées dans le secret intime des morts. Leur puissance brasse en elles : c’est l’eau qui nait, éparpillée, toujours neuve. Ça veut que quelque chose naisse, une autre place pis toute le visible, pli sur pli. Ça veut des lignes, des formes, pour finir de finir une ligne, une forme, droite devant les bêtes. Quoi-ce qu’on fait avec toute l’abandon, tellement proche du corps, qui impose la vue.

Complice de la glaise, la fougère shake. Des traces dans la vase sous le squall pour fixer la vue, sa job, c’est de shaker : la mémoire est fossile pis le vent espère. Ça frôle l’érosion. Ça cherche les craques dans le corps, le trempe, le soaké, le poids divisible du corps, la light poreuse pis le ciel compact. In touch avec la vibe de la vase, la fougère attend pas l’soleil, elle creuse dans l’énigme d’une autre solitude.

Ça passé à travers la vue; d’autres corps de mal. Ça creusait dans la nuit. Ça creusait, ben collé sur le corps, sur le boute de terre du corps rempli d’arbres et de ouacs. Pis c’était pesant, pareil, le corps pis l’autre corps, pis leur extension, lentement, vers le milieu. Pis nous autres, les pauvres, on creusait pareil. On creusait creux, pour démêler les racines barbelées, qui cachaient des savèches d’histoires de peur, pendant les squalls.

Dans la source, la saumure durerait. Ça serait le jour dans les semences pis dans le boute de terre rendu à nos bras habitués à harser. Soleil, spore de fougère, le temps que la brûlure tough; mais la brûlure, c’est pas la soif, encore. Ça serait le jour dans les semences. Pis le squall surgirait de la mémoire souple, avec le chant, la solitude, pis la chance de mourir.