les noms des plantes
je n’ai pas les noms des plantes – je n’ai même pas l’idée d’une fougère, mais j’ai un souvenir de Garfield traduit probablement par un belge
et quelque chose qui grouille dans le sanguin quand on tire des comparaisons avec des ketchoses comme des métaphores mais pas tout à fait
ça fait ketchose comme un tableau troublé de couleurs locales – d’impressions de feuilles vertes et trempées dans les narines
c’est là qu’on se rend compte de lumière toute poussiéreuse aura des limites repoussées par un coup de tête ou avalées de même
puis on trouve les mots cachés dans les cahiers de mots cachés puis on les encercle comme si c’était ça, la chose à faire avec les mots
les encercler puis les lire en diagonale peu importe l’ordre comme chez certains poètes aux parlures soucieusement garrochées
la place la plus vivante dans le bois avec son silence de cierge sent la cire bleu et j’ai le nez dans la flore et la faune du haut-Canada
je n’ai pas les noms de toutes les feuilles ni le contour de tous les dessins mais le parfum d’un livre en français sélection reader’s digest
mémère me fait de la bouillie d’eau bénite ou bedon un bol de rice krispies avec du lait mis au congélateur et petits cristaux de glace dedans
mais là j’ai sur la langue le gout du dentifrice qui fait ketchose au gout du lait comme un cornichon dans coupe de crème glacée
je fais des simagrées qui disent à quel point c’est mauvais puis mémère me dit d’ajouter un peu de sucre blanc dans mes céréales
puis le souvenir fond dans le blanc du bol, le blanc du lait, de la neige, du dentier à mémère, puis du sable sucré gris sur le bout de la langue
— Daniel Aubin